Occidere's Blog

Pollution des eaux par les médicaments

La pollution des eaux par les pesticides est un phénomème largement connu. Les eaux contaminées par les produits dérivés des médicaments l’est moins. Et pour cause, tout est à découvrir. Les interrogations sont nombreuses, les réponses rares et les études limitées.
Les médicaments sont susceptibles de se retrouver dans les eaux par l’intermédiaire des urines et fécès des patients sous traitement(s) (particuliers, hôpitaux), ou par l’intermédiaire des médicaments non utilisés et rejetés à la décharge.

Pour bien situer le problème, je reproduis ci-dessous la réponse du ministre de l’environnement à une question de Guibal Jean-Claude sur la teneur en résidus médicamenteux des eaux en France (paru au JO le 15/11/2005) :

La ministre de l’écologie et du développement durable a pris connaissance, avec intérêt, de la question concernant les résidus de médicaments dans les eaux en France. Les médicaments sont par nature des substances biologiquement très actives. On les trouve essentiellement dans les urines et, dans une moindre mesure, dans les fèces, sous leur forme initiale (pour un médicament faiblement métabolisé) ou sous la forme d’un métabolite, parfois plus toxique. Les médicaments humains se retrouvent principalement dans les rejets des hôpitaux et des cliniques et dans les rejets des stations d’épuration urbaines à des concentrations qui varient selon la biodégradation des molécules, le type de traitement des eaux résiduaires et le temps de séjour des effluents dans la station. En ce qui concerne les médicaments vétérinaires, leurs rejets se font souvent directement dans le milieu naturel, tout particulièrement dans les zones d’épandage, d’élevage et dans les bassins d’aquaculture. Conscient du problème que ces substances peuvent poser pour l’environnement aquatique, le ministère de l’écologie et du développement durable a lancé dès 1996 un programme national de recherche en écotoxicologie (PNETOX) qui finance, entre autres, des projets traitant de cette problématique. L’un de ces projets, intitulé ENIMED (effets non intentionnels des médicaments) a pour objectifs d’une part d’identifier et de quantifier les résidus de médicaments dans les effluents de stations d’épuration et d’autre part d’évaluer les effets potentiels sur les organismes non cibles. Les premiers résultats de certains travaux de recherche financés dans le cadre de ce projet ont été présentés lors du colloque « Risques sanitaires et écologiques des résidus de médicaments dans les eaux – rapprocher science et décisions » organisé à Montpellier les 16 et 17 juin dernier. Différentes études ont montré que des résidus de médicaments sont retrouvés dans tous les compartiments aquatiques (eaux usées, eaux superficielles, estuaires, eaux souterraines, eaux destinées à la consommation humaine), à des teneurs de l’ordre de quelques dizaines de nanogrammes par litre pour les médicaments prescrits sur ordonnance et de l’ordre de quelques milliers de nanogrammes par litre pour les médicaments en vente libre, teneurs qui varient beaucoup selon les saisons. Les effets de ces substances sur le fonctionnement des écosystèmes aquatiques sont encore méconnus mais commencent à être étudiés. La multiplicité des molécules mises en jeu et la spécificité de chacune quant à leurs impacts nécessitent encore un gros effort de recherche tant pour mettre au point des méthodes analytiques que pour développer des tests biologiques. En complément de ces recherches, un programme de travail vient d’être lancé entre l’agence française de sécurité sanitaire des aliments et l’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) pour évaluer le risque sanitaire présenté par les résidus de médicaments dans les eaux destinées à la consommation humaine. En outre, en application du plan national santé environnement, il est prévu de mettre en place prochainement en collaboration avec les agences de l’eau des campagnes d’analyses de substances médicamenteuses dans le cadre des réseaux de surveillance des milieux aquatiques. Enfin, il convient de noter que l’évaluation du risque écotoxicologique est depuis peu prise en compte par l’AFSSAPS dans l’instruction des nouvelles autorisations de mise sur le marché (AMM) des médicaments humains (même si l’efficacité thérapeutique reste le critère déterminant pour la délivrance des AMM), et par l’agence nationale du médicament vétérinaire dans l’instruction des AMM des médicaments vétérinaires, qui aboutit parfois à la prescription de mesures de réduction des risques.

Voir aussi l’article de la Revue Prescrire, la pollution des eaux par les médicaments, un risque émergent pour l’humain, 15 juin 2007.

Pour avoir une idée de la concentration en dérivés médicamenteux de certains cours d’eaux français, je renvoie à ce lien (pdf)  sur le site eau-seine-normandie.fr.

L’Afsset (Agence Française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail) a également réalisé en 2007, sur mission de l’Institut national du cancer (INCa), une étude sur la contamination des milieux par des molécules anticancéreuses provenant des rejets hospitaliers et des traitements ambulatoires. Je n’ai pas trouvé sur internet la synthèse des résultats qui devait être rendu public pour fin 2007. La revue prescrire (n°310 aout 2009) laisse craindre des effets tels que mutations bactériennes aquatiques, induction d’effets immunitaires ou cancérogènes chez les humains (par micropollution d’eaux de boisson ingérées quotidiennement).

Il n’existe pas à ce jour de règlementation concernant les niveaux de concentration de médicaments (ou de leurs métabolites) dans l’environnement.

Pour le particulier, jouer la carte de la prévention en rapportant systématiquement les médicaments non utilisés en officine.

Pour ceux qui désirent aller plus loin, je renvoie à cette page : volume 5, n°4, Juillet-Aout 2006 de la revue Environnement, Risques, Santé (partie communication : nombreux articles gratuits)

MISE A JOUR 29 juillet 2009 :

  • Deux vidéos :

JT- France 2 – 2008 – 3mn10

Pollution de l’eau par les médicaments

ARTE – 2009 – 8mn53

Rivières de médicaments

  • Un décret du 17 juin 2009 (pdf) vient modifier les règles sur le recyclage des médicaments.  Cyclamed, jusqu’à présent chargé de la récupération des médicaments,  fera l’objet d’un nouvel agrément conforme au nouveau décret (info à vérifier). Pour l’heure, il semblerait que la réutilisation humanitaire des médicaments non utilisés soit stoppée, en raison d’une inadéquation avec les besoins réels des pays concernés. L’élimination par incinération des médicaments non utilisés est désormais la règle (sauf les produits stupéfiants qui font l’objet d’un traitement à part). Le pharmacien ne pourra refuser  la collecte des médicaments rapportés par le particulier, et les entreprises du médicament seront mis à parti dans le processus.

25 juillet 2009 - Posted by | vigilance | ,

Aucun commentaire pour l’instant.

Laisser un commentaire